Natation



Réflexion sur la natation (par Denis BEURIVE)





Introduction

Ce texte n'a pas pour but de décrire en détail les mouvements des quatre nages … Je vais casser pas mal d'idées reçues sur la natation puis je vais dévoiler des aspects méconnus de cette discipline. Je suis absolument certain que vous n'avez jamais entendu un tel discours sur la natation … Cette réflexion est le fruit de 20 ans d'entraînement régulier. J'espère vous donner l'envie de nager.

Comparaison natation / activités terrestres

La notion de "poids du corps"

Cette notion est pratiquement absente de la natation. Le corps est en apesanteur dans le milieu liquide. Seules deux nages font intervenir la notion de poids du corps, mais de façon indirecte et sans comparaison avec les activités terrestres. Ces deux nages sont la brasse et le papillon (cf note 1). Aussi bien en brasse qu'en papillon, il est nécessaire de soulever la poitrine hors de l'eau pour respirer . Il faut donc utiliser les bras et tout le corps afin de soulever la poitrine hors de l'eau.

En natation la notion de " poids du corps " est tout á fait négligeable devant la notion de " résistance du fluide " … Tout l'art de la natation réside dans la maîtrise de la " résistance du fluide ".

Note 1: Il ne faut pas utiliser le cou (en tirant la tête vers l'arrière) pour respirer ! Cela est nuisible pour l'hydodynamique, et de plus cela fatigue beaucoup les cervicales. Ce défaut s'observe pratiquement toujours chez les nageurs débutant.

Le rôle des pieds

Lá aussi, rien de comparable avec les activités terrestres. Les pieds jouent un rôle mineur en natation.

Dans toutes activités terrestres le déplacement se fait en grande partie grace á la réaction du sol sur la plante des pieds. La masse du corps repose sur les pieds. Les pieds, très sensibles, jouent un grand rôle car ils nous permettent d'estimer l'intensité, le sens et la direction de la réaction du sol.

En natation le déplacement résulte de l'utilisation de toutes les parties du corps : mains, avant bras, cuisses (penser au ciseaux de la brasse), tibias, dos (penser á l'ondulation du papillon), … C'est le corps dans sa totalité qui nous renseigne sur la réaction du fluide. Il peut s'agir de réactions motrices (pression sur les zones motrices) ou de réactions " résistantes " (frottement du fluide contre le corps - ralentissement). La perception au niveau des pieds est tout á fait négligeable.

La notion d'équilibre

Lá aussi il y a contradiction entre activités terrestres et natation. En natation le corps est (exactement) á l'horizontal. Dans les activités terrestres, le corps tend vers la verticalité. De plus un nageur n'a pas á se soucier de son équilibre : le corps est en équilibre (mécaniquement parlant). Remarquer aussi que la notion de chute est totalement absente en natation. On n'a jamais vu un nageur se blesser parce qu'il a chuté lors de la pratique de son sport favori!

La tonicité musculaire

L'eau " se dérode " sous votre poussée. Par contre, le sol (la terre), lui ne bouge pas. La réaction du sol est totalement différente de la réaction de l'eau. Sur terre il est possible de se déplacer " par impulsion " (exemple : en sautant) … dans l'eau les choses sont différentes. Essayer donc de sauter dans l'eau.

De par la différence entre la réaction de l'eau et la réaction du sol, le travail musculaire en milieu aquatique est différent de celui en milieu terrestre. En milieu terrestre, les muscles doivent répondre de façon tonique (par impulsions). En milieu aquatique la réponse musculaire est très progressive et se prolonge pendant tout le mouvement. Par exemple en nage libre il faut appliquer une tension musculaire progressive sur toute la durée de la poussée (quand le bras est sous l'eau).

Ce que développe la natation

Tordons le cou á quelques idées fausses

Première idée fausse : bien nager ne veut pas dire " nager vite " … Un nageur qui nage bien, est capable de se déplacer rapidement d'eau l'eau. Par contre un nageur rapide, n'est pas forcément un bon nageur.

Deuxième idée fausse : un bon nageur est quelqu'un de très musclé. C'est totalement faux ! S'il est vrai que les nageurs de compétitions sont, en général bien musclés, c'est parce qu'ils recherchent avant tout la performance. Mais prenez un haltérophile et demandez lui de nager … le résultat risque d'être décevant.

Troisème idée fausse : un bon nageur possède une grande souplesse articulaire. C'est faux, on peut nager très bien et ne pas être spécialement souple Il est vrai, qu'en observant un bon nageur, vous avez l'impression qu'il ne déplace " tout en souplesse " … mais cela ne vient pas de la souplesse du nageur lui même. Un contorsionniste n'est pas avantagé face á " monsieur tout le monde " quand il s'agit de nager.

La natation n'est ni une question ne force, ni une question de souplesse. Une personne " ordinaire ", qui ne " paie pas de mine " peut se révéler un excellent nageur.

La natation, c'est quoi ?

Savoir nager, c'est pouvoir se déplacer dans l'eau.

Savoir bien nager c'est avoir pris conscience de la viscosité du milieu aquatique.

Concrètement, comment cette prise de conscience se matérialise-t-elle dans la pratique? La réponse est simple et tient en trois mots : pression, écoulement et tonicité musculaire.

  • Le nageur doit en permanence se concentrer sur la pression de l'eau sur les parties motrices de son corps (bras, jambes ou tout le corps - cf note 2).
  • Le nageur doit en permanence se concentrer sur l'écoulement de l'eau contre sa peau.
  • Le nageur doit en permanence ajuster la tonicité de ses muscles.

Remarquer que je n'ai pas prononcé les mots force, style, souplesse ou vitesse. Le style, la " souplesse " du nageur et sa rapidité de déplacement dans l'eau découlent directement de la prise de conscience de la viscosité du milieu aquatique.

Note 2: Cf l'ondulation du papillon.

Prise en compte permanente de la pression exercée par l'eau sur les parties motrices du nageurs

Le nageur doit ajuster en permanence le mouvement des parties motrices de son corps afin d'obtenir le meilleur rendement. Le but étant bien sûr de se mouvoir de façon á générer une pression maximale sur les parties motrices. De par sa nature, l'eau se " dérobe " sous la poussée. Le nageur n'a pas de " point fixe " sur lequel prendre appuie …

Remarquer que les différences de pressions á l'origines du déplacement du nageur sont de la même nature que celles á l'origine du vol des oiseaux … L'eau et l'air sont des milieux comparables du point de vue de la mécanique. Le coefficient de viscosité de l'eau est beaucoup plus élevé que celui de l'air, mais ces deux corps obéissent, globalement, aux mêmes lois de la mécanique.

Remarque: Dans des conditions " extrêmes ", ces deux corps ont des réactions incomparables. Mais ces conditions ne nous intéressent pas : un nageur ne va pas nager dans une eau á 99,9 ° (juste sous le point d'ébullition)!

Prise en compte de l'écoulement de l'eau autour du nageur

La sensation d'écoulement résulte d'une différence de pression. Par conséquent, parler de " sensation d'écoulement " peut, á juste titre, sembler redondant avec l'emploi de " sensation de pression ". Mais ce rapprochement est plutôt théorique.

La natation est une activité physique … il convient donc d'adopter un discours pratique. Un nageur comprendra tout de suite les termes " écoulement " et " pression " car ce sont deux notions " palpables ". Par contre, il n'est pas évident qu'il saisisse la relation physique (théorique) entre pression et écoulement.

L'écoulement de l'eau autour de son corps renseigne le nageur sur l'hydrodynamisme de son corps. Si l'eau s'écoule bien, cela signifie que le corps du nageur offre peu de résistance au déplacement.

En se concentrant en permanence sur la sensation de l'eau qui s'écoule le long de son corps, le nageur peut modifier la position de tout son corps (bras, jambe, buste et tête) afin de faciliter cet écoulement. N'avez- vous pas observé les bons nageurs ? Ils ont tous la même façon de nager … vous ne verrez jamais un bon nageur lever la tête pour respirer en brasse (or c'est un défaut très courant). En faisant ainsi vous augmenter la résistance á l'écoulement de votre corps … en d'autres termes vous n'êtes pas hydrodynamique. Imaginer un peu que l'on vous attache un seau aux pieds pour vous ralentir. En plus, en levant la tête pour respirer vous vous faites mal aux cervicales.

Gestion de la tonicité musculaire

Il faut se rappeler de ces trois constatations :
  • Un muscle contracté consomme plus d'oxygène.
  • Un muscle contracté est plus lourd.
  • D'une façon générale, toute contraction constante est nuisible. Afin de bien travailler, un muscle doit alterner contraction / décontration.

Ce sont des constations tout á fait générales. On peut les appliquer á n'importe qu'elle activité physique, et en particulier á la natation.

  • En natation la gestion de l'oxygène est fondamentale … tout débutant s'en rend compte très rapidement. Diminuer sa consommation en oxygène est une nécessité absolue en milieu aquatique.
  • Dans l'eau le corps est á l'horizontale. Toute modification dans la distribution des masses corporelles du nageur provoque un déséquilibre néfaste á l'hydrodynamisme du nageur. En effet, le nageur se déplace horizontalement. Dans cette situation, la meilleure position du corps (du point de vue de l'hydrodynamisme) est la position horizontale. Si vos pieds sont lourds et " tirent " vos jambes vers le bas, alors votre résistance á l'eau va augmenter de façon considérable !
  • L'important c'est le mouvement : il faut " pousser dans le sens opposé au déplacement ". Cela implique un cycle mécanique " poussée / repositionnement en préparation á la poussée suivante ". La contraction musculaire doit se faire dans la phase de poussée … l'autre phase doit être une phase de décontraction. Les contractions permanentes sont très néfastes et peuvent même provoquer des problèmes de dos (même en natation), des crampes musculaires et des tendinites.

En nage libre par exemple, lorsque vous sortez un bras de l'eau, vous devez décontracter tous les muscles du bras … Vous êtes gagnant á tous points de vue:

  • C'est un temps de repos. Vous vous reposer.
  • Un bras décontracté est plus léger qu'un bras contracté, surtout hors de l'eau !. Résultat, vos épaules restent dans un plan horizontal. Par conséquent vous conservez votre hydrodynamisme. Une épaule qui penche d'un côté génère une résistance á l'écoulement de l'eau.
  • Vous consommez moins d'oxygène : l'énergie est mieux répartie. L'oxygène va aux muscles qui en ont besoin (par exemple á l'autre bras qui est en train de pousser dans l'eau).
  • Pas de contraction au niveau du cou. Les débutants se plaignent qu'ils ont du mal á respirer en nage libre. Vous respirez du côté du bras qui sort de l'eau. Si ce bras est contracté, votre épaule est contractée et par conséquent votre cou est aussi contracté. Dans ces conditions, il vous est pénible de tourner la tête !

L'exemple le plus flagrant est le papillon. Si vous n'avez pas saisi les cycles contraction / repos en papillon, vous ne pouvez tout simplement pas nager le papillon. C'est le cas extrême. Les débutants sont contractés en permanence lorsqu'ils essayent le papillon … ils ne nagent pas 20 m. Au delá ils sont essoufflés.

Conclusion

La natation est beaucoup plus qu'une simple activité destinée á se muscler. C'est un art, l'art de se fondre dans le fluide qui entoure le nageur.

Bien pratiquée, la nation vous apporte:

  • Une prise de conscience de votre corps grâce aux interactions avec le milieu aquatique.
  • Une compréhension de la distribution de l'énergie (oxygène) entre vos parties motrices.
  • La maîtrise de soi Dans l'eau il ne sert á rien de s'énerver… au contraire. Les mouvements sont lents, réfléchis. Vos mouvements résultent d'une grande concentration visant á optimiser votre pénétration dans l'eau.

Accessoirement la natation développe aussi votre musculature, mais il n'est pas nécessaire d'être très musclé pour bien nager. Il faut casser le cou á la méthode traditionnelle d'enseignement de la natation. Faire des longueurs dans le seul but de faire des longueurs, est totalement inefficace. Après de longues années d'entraînement á vous farcir des longueurs, vous deviendrez peut-être un bon nageur. Mais vous ne saurez pas pourquoi … C'est une technique de brute qui risque de vous dégoûter de la natation. En plus vous passez á côté de l'essentiel, quel dommage !








La motricite et les systemes de controle, la construction d'une locomotion aquatique.


J'ai trouvé sur le net un text très intéressant traitant de la proprioception en milieu aquatique. Ce texte expose de facon très détaillée les idées que j'évoque dans ma réflexion sur la natation. Ce texte provient de l'URL:

http://lomu.unice.fr/~amuti/licence-didactique/activit%82%20perceptive/percption.doc

Le texte original, au format Word, n'est pas très bien présenté. Aussi je l'ai converti au format HTML.



INTRODUCTION

C’est par le mouvement que l’homme se construit, s’organise de façon cohérente par rapport au monde environnant. Nous entrons en relation avec l’espace selon deux systèmes distincts, celui qui concerne l’espace du corps et celui qui concerne l’espace extra corporel.On distingue des récepteurs à distance: l’oeil, l’oreille externe, mais aussi des récepteurs de contact et de pression. Le contact solide et permanent de la motricité du terrien est assuré par ses appuis plantaires.

Il existe un lien indissociable entre l’action, la cognition et la perception dans l’organisation de l’action motrice. La perception est caractérisée par l’implication instantanée de l’activité coordonnée de plusieurs systèmes sensoriels.(NEISSER- p347)(1). Elle n’est pas seulement une interprétation des messages sensoriels, elle est simulation interne de l’action, jugement et prise de décision; elle est anticipation des conséquences de l’action.(7)

Un grand nombre de récepteurs sensoriels (extéro et proprioceptif) participent à la proprioception dans son rôle de contrôle de la posture et du mouvement.

La particularité du milieu aquatique entraine une modification des sources d’informations propres à l’organisation motrice du terrien remettant en cause ses repères habituels.

LES MODIFICATIONS COMPORTEMENTALES IMPOSEES PAR LE MILIEU.

L’enjeu pour le futur nageur est de passer d’une motricité à contrôle extéroceptif, à une motricité à contrôle kinesthésique. Il y a alors une remise en cause:

  • de la stabilité du regard; En effet, selon J. Paillard (3), le référentiel céphalo centré constitué par la tête permet d’assurer la stabilisation automatique de l’horizontalité du regard lorsque celle-ci change de position. Or en natation, ce référentiel conduit le débutant à redresser automatiquement la tête, en partie pour rétablir l’horizontalité du regard, perturbant son équilibre.
  • du contrôle de l’équilibre lié notamment aux appuis plantaires.Le réflexe proprioceptif de soutien est mis en jeu par le poids du corps sur les membres inférieurs et par le contact des surfaces plantaires aves le sol horizontal et rigide. Ce réflexe permet le positionnement vertical du corps et des membres ce qui assure l’attitude érigée de stabilité automatique.Le système postural permettant la position érigée, géocentrée est réglée par les informations prélevées par l’oeil, l’oreille interne et le pied.
    Le débutant recherche en permanence la position érigée et le regard horizontal. De plus, la perte des appuis plantaires entraine une hypotonie qui ne permet pas la transmission des forces propulsives. Le corps déformé par l’eau, ne favorise pas la glisse par un bon profil hydrodynamique.C’est par la tonicité du corps et par un étirement sur l’axe de déplacement que l’équilibre du corps est assuré.
  • de la rééquilibration par les bras. L’élément propulseur n’étant plus à l’intérieur du polygone de sustentation, la propulsion horizontale est prioritairement assurée par les bras.

L’ORGANISATION POSTURALE DU TERRIEN ET DU NAGEUR

l’équilibre vertical et géocentré du terrien est assuré par des automatismes acquis; il est réglé par l’ensemble des sensations qu’il a de son corps. Mais également par des réflexes et en particulier:

  • les réflexes labyrinthiques de l’oreille interne
  • les réflexes occulo-visuels et plantaires
  • les réflexes provenant des muscles de la nuque et de la colonne vertébrale

L’ensemble de ces informations provenant de l’oeil, du pied, de la nuque et de l’oreille interne, permettent au système postural, soumis à la pesanteur de maintenir en permanence l’équilibre vertical du terrien.

Dans l’eau, les informations prélevées par l’ensemble de ces capteurs sont modifiées et rendent le comportement du débutant inadapté au nouveau milieu.

En effet, la locomotion aquatique impose:

  • de modifier les sensations labyrinthiques du fait du basculement de la tête à l’horizontale.
  • de varier les pressions d’appuis dans l’eau qui de solides deviennent fuyants.
  • de réorganiser le tonus de soutien soumis à l’apesanteur, ce qui modifie le poids du corps.

Les différentes structures nerveuses impliquées dans le mouvement et la posture

Il existe 3 types d’afférences sensorielles:

  • les afférences extéroceptives.
  • les afférences proprioceptives.
  • les afférences intéroceptives; elles concernent la sensibilité profonde ; les récepteurs sont sensibles aux variations sanguines, de Co2, du rythme respiratoire, etc...; Ces informations ne sont utilisées que par les très bon nageurs.

Les afférences extéroceptives

Les récepteurs sont situés à la périphérie de la surface du corps et donnent des informations sur l’environnement

  • soit au contact, toucher.
  • soit à distance , télérécepteurs visuels, auditifs.Ce sont des extérocepteurs; leur stimulation ne dépend pas directement de l’activité du sujet.Ces 3 groupes d’extérocepteurs interviennent directement en natation.

Les afférences proprioceptives

La kinesthésie est une modalité de la sensibilité proprioceptive. Elle signifie sens de la position, sens du mouvement. Elle permet de discriminer la position des différentes parties du corps, le sens, l’amplitude des mouvements grâce aux récepteurs de la proprioception. Ils rendent compte de la position du corps et des segments par rapport au corps dans l’espace.

La kinesthésie ne constitue pas un sens unitaire comme la vision, l’audition; on pense que le cortex utilise une combinaison de signaux émis par l’ensemble des récepteurs; c’est cette combinaison qui est à la source de la kinesthésie. Ils regroupent:

  • les récepteurs des fuseaux neuro-musculaires
  • les récepteurs tendineux et articulaires
  • les récepteurs du vestibule
  • Les récepteurs musculaires apparaissent les plus importants par rapport à la kinesthésie; les autres récepteurs sont secondaires (étirement des tendons, articulation, pression sur la peau)
  • l’analyseur labyrinthique règle l’équilibre du corps en relation avec la vision, les appuis plantaires et les muscles de la nuque.Les récepteurs du labyrinthe donnent des informations relatives aux différentes positions et mouvements.

La fonction essentielle du labyrinthe est de stabiliser la position des yeux, de la tête et du tronc par rapport à l’espace. Il régit les réactions commandées par la position de la tête par rapport à la verticale.Il règle de ce fait le tonus des muscles de la nuque car le vestibule est sensible à l’activation des capteurs des muscles du cou..Les réflexes vestibulaires stabilisent l’image sur la rétine quand nous nous déplaçons. Vision et canaux semi-circulaires sont associés dans la perception. Les 3 paires de muscles des yeux sont dans le même plan que les canaux; il y a là une convergence géométrique favorisant la perception et le contrôle du mouvement. La vision est trop lente pour détecter les mouvements rapides (au-delà de 600° par seconde). Les capteurs vestibulaires mesurant vitesse et accélération renseignnent le cerveau sur la mise en mouvement, plus vite que la vision.

Le système labyrinthique ou vestibulaire dispose de deux groupes de récepteurs:

  • les canaux semi circulaires (sagittal, frontal, horizontal) responsables des réflexes posturaux cinétiques. Ce sont des détecteurs d’accélération angulaire.
  • l’utricule et le saccule (8): responsables des réflexes posturaux statiques. Ce sont des détecteurs d’accélération linéaire.

L’oreille interne est le détecteur de toutes les variations dynamiques des mouvements. Il détermine la trajectoire et les différentes positions le long de cette trajectoire. Fixer les détecteurs, donc fixer la tête sur la trajectoire est le moyen le plus efficace d’utiliser ce détecteur pour déclencher d’autres mouvements.(4) Pour le débutant, la première source d’accès à l’information étant visuelle, le réflexe occulo-vestibulaire est perturbé dans l’eau et ne permet pas d’utiliser la vision, donc de stabiliser le champ visuel. C’est la raison pour laquelle les informations sensitivo-sensorielles prennent le relai pour construire l’espace d’action.

L ‘information visuelle, même modifiée doit demeurer pour perturber le moins possible la stabilité de la tête pour redonner au système vestibulaire sa fonction première.

Le débutant a besoin de repères stables pour stabiliser la tête, ce qui permet de déclencher les mouvements prioritaires des bras, source de progrès en natation.

Ces repères vont permettre de construire un espace dans lequel la motricité va s’organiser. Ils se situent plus particulièrement autour de la tête et aident à construire les limites de l’action des bras.

Du fait de la multiplicité des récepteurs impliqués, la perception de la trajectoire dans le mouvement peut être influencée par la façon dont le mouvement s’est produit; par exemple, recréer un mouvement à sec en natation, modifie les perceptions kinesthésiques, donc, donne une fausse image du bon mouvement. L’approche de type bio-informationnel vient compléter les approches bioméca et bioénergétique de l’activité. Elle permet de mettre en place une démarche d’ exploration et d’appropriation active du milieu.

Les progrès ne sont plus conçus à partir de programmes moteurs préétablis ( la répétition ou l’imitation du bon modèle) mais à construire dans un répertoire d’actions très variées.

COMPORTEMENT DU NAGEUR

Il reçoit à chaque instant de ses déplacements des informations sensorielles: déplacement par rapport au fond de la piscine, par rapport à la ligne d’eau, à ses adversaires, etc..; des informations proprioceptives sur les positions successives des segments par rapport au corps, de ses articulations, de son corps lui-même. la situation du nageur, "l’état du système", est caractérisé par ces informations qui remontent au SNC. Les différents états du nageur sont codés et l’exploitation cohérente des informations est permise grâce à 3 niveaux de fonction:

l’une concerne l’extraction des informations pertinentes qui arrivent souvent mélangées au cerveau, surtout chez le débutant. Le bruit de l’attaque des bras de l’eau, celui des vagues, la juste appréciation du niveau de la face par rapport à la surface de l’eau, le déplacement rectiligne pour parvenir au mur etc.. A cette étape, le nageur doit séparer les sources d’information.

la seconde fonction est relative au codage et à la représentation du nageur dans le milieu, du milieu lui même. A ce stade, l’information est quantifiée car le milieu étant stable, les situations de déplacement dans l’eau sont souvent identiques pour une même nage ou forme de locomotion.

Le troisième stade est celui de l’exploitation des informations codées, pour anticiper ou ajuster la bonne réponse, grâce à l’association d’une suite d’états : le plongeon, les déplacements, le virage..

Ces trois moments, séparation des sources, quantification des données, prédiction ou choix des bonnes réponses, exigent un apprentissage et une mémorisation des différents traitement à effectuer et des décisions à prende.

Le nageur expert met au point des stratégies de gestion optimale des informations, à un niveau de conscience faible; car c’est le contrôle automatique de la motricité qui prend le relai nécessitant un faible effort mental. Le débutant a son attention retenue par une quantité de paramètres qu’il tente de contrôler simultanément sans y parvenir, alors que l’expert réduit sa charge attentionnelle et informationnelle aux seuls indices pertinents pour réaliser la tâche; celle-ci est de plus en plus directement contrôlée par l’information proprioceptive. L’expert se dégage des boucles cognitives longues et coûsteuses en temps de traitement; Les contrôles sensorimoteurs caractérisés par leur caractère automatique, ne nécessitent pas la mobilisation de processus attentionnel du sujet (Paillard)(2). Le traitement de la tâche et son contrôle à partir des circuits proprioceptifs est moins coûteuse que par le guidage visuel.

NATURE ET ROLE DES DIFFERENTS REPERES EN NATATION POUR PROPOSER DES TACHES

L’homme possède et utilise 5 sens. La kinesthésie, le sens du mouvement est le 6ème sens.

En natation, les informations de nature extéroceptive et proprioceptive permettent de construire un nouveau référentiel d’action chez le débutant. Mais quel que soit le niveau , elles sont en permanence utilisées par le nageur pour produire, contrôler et assurer une meilleure efficacité de l’action .

Les informations extéroceptives

visuelles: dans l’eau, la vision n’est pas réduite mais modifiée selon D. Chollet (5). Elles jouent un rôle fondamental dans l’équilibration et l’orientation du corps dans le milieu, d’ou l’importance chez le débutant de conserver les yeux ouverts.Par contre la recherche des déplacements yeux fermés peut favoriser la perception plus fine du placement de la tête.La vision facilite le repérage du nageur dans l’espace : lors des départs et des virages , par rapport à la ligne de fond, lors du sauvetage, lors d’une compétition etc...ainsi que la localisation des segments. Il est intéressant de proposer des tâches contrôlées par la vision afin de mieux placer les surfaces propulsives, lorsque celles-ci ne sont pas dans le champ visuel: ex.

  • placement des jambes et des pieds en brasse.
  • ondulation des jambes en papillon.
  • retour aérien des bras en dos crawlé après le plan vertical du regard.
  • lors de l’inspiration ; la ligne d’eau, l’épaule, la main.
  • voir le fond de la piscine pour aligner la tête.

La vision périphérique: (récepteurs des cellules en bâtonnets) . Elle a pour rôle de localiser une cible dans le champ visuel dans une situation dynamique; les informations sont rapides mais peu précises.Elle intervient quand il s’agit de se régler par rapport au mur, aux autres etc..

La vision centrale (récepteurs des cellules en cônes). elle intervient prioritairement dans les situations statiques. Elle a pour rôle d’itentifier les informations recueillies; elles sont précises mais lentes à mettre en oeuvre. Elle intervient dans la localisation des segments, le placement des appuis, la tonicité...

Auditives: de même , l’audition est modifiée. Elle aide le nageur à percevoir le paramètre rythmique des mouvements; elle permet de vérifier si la main entre dans l’eau sans frapper , de recevoir les consignes verbales. Toutefois, le débutant éprouve un déficit auditif car confronté simultanément aux problèmes respiratoires et de vision; Il faudra donc l’intégrer progressivemement

tactiles: les repères tactiles aident à la construction de l’espace; ils délimitent les actions devant et derrière, ce qui à terme permet de construire l’amplitude. Les repères mains devant, cuisses, oreilles, tenue de la planche, port des plaquettes sont une aide:

  • à la construction de l’alignement du corps sur l’axe horizontal de déplacement en situant les membres, la tête, et en organisant les trajets propulsifs.
  • à la la construction de la perception de la pression et de sa localisation liée aux récepteurs somesthésiques, tels que les récepteurs de Pacini, Meissner (6) participant à la prise de conscience des surfaces corporelles intervenant lors de la propulsion (pression des appuis).

Ils jouent également un rôle dans la perception temporelle indissociable de l’espace.

Les capteurs du toucher ont le pouvoir d’anticipation car ils mesurent les variations rapides des forces de pression ou de la vitesse de glissement d’un objet sur la peau. Ils sont répartis dans les régions les plus impliquées dans la perception tactile (bouche, main, pied, cuisse).

Les informations proprioceptives

Issues des récepteurs internes, l’organe de Golgi et le récepteur de Ruffini, elles informent sur la position et les mouvements propres au système et à ses parties. Ils recueillent des sensations renseignant sur la tension musculaire, la position et l’activité des articulations ainsi que de l’équilibre. Elles sont de plus en plus sollicitées au fur et à mesure du niveau d’expertise.

Les sensations kinesthésiques

Les capteurs neuro-musculaires détectent l’allongement du muscle; ils permettent de construire l’amplitude.Le cerveau peut modifier leur sensibilité grâce aux motoneuronnes gamma sous le contrôle de la volonté et de l’intention. Il y a là un mécanisme d’anticipation dû à la modulation des propriétées dynamiques des fuseaux musculaires.

les récepteurs articulaires renseignent sur la position de l’articulation et la direction du mouvement ; utiles dans la construction des trajets moteurs.Les récepteurs de Golgi mesurent l’effort exercé par le muscle sur son articulation. Situés dans les tendons en série avec le muscle. Ce sont des capteurs de variation de force.

le système vestibulaire

Inopérant chez le débutant qui doit basculer la tête de 90°, il aide à construire les différentes formes d’équilibre dans l’eau . Que le corps soit vertical ou groupé ou allongé, il y a équilibre chaque fois que le centre de gravité passe par la ligne de gravité.

Intervenant dans les fonctions d’équilibration statique et dynamique, il aide à percevoir les rotations avant et arrière lors des virages , des départs, des plongeons canards, des accélérations car ils sont sensibles à la vitesse de déplacement.

D’autre sources d’informations contribuent à améliorer les repères chez le nageur; L’amplitude et la fréquence gestuelle sont des repères ; le chronomètre également, ainsi que l’allure adoptée par un partenaire.

conclusion

La prise d’information est particulière et complexe en natation, du fait de la nature du milieu.Elle intervient dans l’appropriation et la maîtrise simultanées de la respiration, de l’équilibre et de la propulsion.Toute la difficulté pour le débutant est de construire un nouveau référentiel utilisant de nouvelles sources d’informations qui progressivement transformeront les réflexes et les automatismes du terrien. Le passage d’un référentiel visuel à un référentiel majoritairement proprioceptif constitue la différence et l’enjeu entre le débutant et l’expert.dans cette construction, la tête, son placement et son utilisation aura des conséquences sur la prise d’information, l’équilibre, la respiration et la propulsion. Elle demeure donc bien la clé des réorganisations locomotrices.









Bibliographie

  • M.Récopé- Statut et fonction du schème duel dans l’organisation de l’action motrice d’opposition-(le cas du volley-Ball)- Thèse de Doctorat.
  • Paillard j.- Le pilotage du moteur musculaire. Neurobiologie des comportements moteurs; INSEP Publication.
  • J. Paillard- Les déterminants moteurs de l’organisatin de l’espace- Cahiers de psychologie-1971.
  • Rossi B.- Neurosciences et sport: le point de vue de la psycho-physiologie; Dossiers EPS N°10 -p211-216.
  • Chollet D. - Approche scientifique de la natation- 1993.
  • quelques rappels:
    • récepteurs de Pacini- récepteurs de pression situés dans le derme profond; sensibles à des déformations mécaniques faibles et de courte durée.
    • récepteurs de Meissner- récepteurs tactiles de la sensibillité situés dans la peau.
    • organe de Golgi- dans le ligament articulaire.
    • récepteur de Ruffini- dans la capsule articulaire.
    • sensation- désigne un état de conscience des stimuli externes ou internes.
    • perception - désigne la sensibilisation et l’interprétation consciente des sensations.
  • Alain Berthoz- le sens du mouvement, p.15- Edition odile Jacob-1997.
  • les canaux sont remplis d’un liquide visqueux, l’endolymphe. A leur base, une cupule contenant les cils sensoriels sensibles à la pression donc aux variations de pression produites par les accélérations angulaires. Quand la tête tourne brusquement, l’endolymphe, du fait de son inertie, se déplace moins vite que la tête. Plus l’accélération est grande et plus l’endolymphe se déplace dans la canal. Les canaux sont soumis à un contrôle centrifuge du SNC.
  • le saccule et l’utricule: le premier est sensible aux accélérzations verticales, le second aux accélérartions horizontales; les, à l’inclinaison de la tête. Un déséquilibre entraine une accélération de la tête ce qui excite les otholites ( grains calcaires baignés dans l’endolymphe du saccule et de l’utricule) entrainant le réflexe vestibulo-spinal de redressemeent de la tête. Comme les otholithes mesurent l’accélération qui est maximale dès le départ, le réflexe de redressement est immédiat. Les capteurs vestibulaires sont des capteurs et des déclencheurs.